Ne touchez pas au FCTVA !

La loi de Finances pour 2008 va mettre à contribution les finances locales. D’ores et déjà, il semble que le gouvernement veuille remettre en question l’indexation partielle sur la croissance de l’ « enveloppe normée », faisant ainsi perdre plusieurs centaines de millions d’euros de ressources au service public local.

Conscient que cette évolution risque d’assécher très rapidement le développement – par ailleurs revendiqué – de la péréquation, le pouvoir central cherche activement à remettre en cause, dès cette année ou l’année prochaine, d’autres mécanismes organisant les liens financiers entre l’Etat et les collectivités locales et qui trouvent souvent leur origine, faut-il le rappeler, dans la propension du pouvoir central à supprimer ou alléger des taxes et impôts locaux et à les remplacer par des dotations ou compensations[1]. Parmi ces mécanismes figure le FCTVA, dont le montant pour 2007 est de 4,7 milliards d’euros. Retour rapide sur l’histoire d’un être budgétaire à part !

En 1975, répondant enfin à une forte revendication des élus, le gouvernement annonçait la mise en place d’un « fonds d’équipement des collectivités locales (FECL)». Les élus – et singulièrement les maires – contestaient alors avec vigueur le fait de devoir payer la TVA sur les investissements qu’ils réalisaient, depuis la généralisation de la TVA en 1968, et arguaient du fait que, plus les communes investissaient – ce que le pouvoir central leur demandait instamment de faire à l’époque -, plus elles enrichissaient l’Etat. La création du FECL a alors comme objectif affiché de compenser en partie la TVA payée sur les investissements, mais la répartition du fonds est alors liée à l’effort fiscal et non au volume d’investissement réalisé. En 1977, les élus locaux et le Sénat remportent une nouvelle victoire en obtenant la modification du nom du FECL, qui devient « fonds de compensation de la TVA (FCTVA) ». Le FCTVA est désormais directement lié au volume d’investissements réalisé par chaque collectivité et son montant atteinte dès 1981 le montant total acquitté par les collectivités sur leurs dépenses d’investissement.

Depuis, malgré d’innombrables rapports[1] et de très nombreuses tentatives de l’Etat pour remettre en cause la nature originelle du FCTVA, les élus et la plupart des parlementaires ont tenu bon. L’esprit et la lettre de la loi de Finances rectificative pour 1977, qui dispose que « les ressources du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée des collectivités territoriales comprennent les dotations budgétaires ouvertes chaque année par la loi et destinées à permettre progressivement le remboursement intégral de la taxe sur la valeur ajoutée acquittée par les collectivités territoriales et leurs groupements sur leurs dépenses réelles d’investissement »[1], ont été globalement préservés.

Le FCTVA constitue à lui seul une catégorie particulière de crédit budgétaire. Ni subvention puisque ayant un caractère automatique, ni remboursement intégral, puisque la TVA acquittée sur certaines dépenses ne donne pas lieu à remboursement, ni dotation globale puisque directement lié aux dépenses effectuées, le FCTVA reste avant tout l’acquit d’un combat véritablement politique livré par les élus locaux, pendant des années, contre le pouvoir central, dans une période où la motion de chaque assemblée départementale de maires redoutait la « crise des finances locales ». Remettre en cause son assiette, son mode de calcul, sa répartition, constituerait un retour en arrière et raviverait un contentieux politique lourd, qui ruinerait toute tentative d’une collaboration plus confiante entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux, dont notre pays a bien besoin.

Ce serait aussi une atteinte à la morale financière et fiscale : ne pas compenser entièrement la TVA sur les investissements publics locaux conduirait à ce que l’Etat prélève une dîme sur ces investissements, dont chacun s’accorde à reconnaître la grande nécessité pour la vie quotidienne de nos concitoyens et la préservation de notre environnement d’une part, et le rôle majeur joué dans la croissance économique du pays d’autre part. Dans les pays qui respectent l’autonomie locale, en particulier aux Etats-Unis ou au Canada, l’Etat central ne peut, constitutionnellement, taxer les collectivités locales. Ne faisons pas une fois de » plus de la France une exception.

Mesdames et messieurs les ministres, ne touchez pas au FCTVA, ni aujourd’hui, ni demain.

 

 

[1] On sait cela pour les compensations concernant notamment la taxe professionnelle, la vignette automobile et, dans une moindre mesure, la taxe d’habitation et la taxe sur le foncier non bâti. Mais il faut aussi se souvenir qu’une bonne partie de la DGF vient de la suppression en 1966 de la taxe locale sur le chiffre d’affaire à la suite de la généralisation de la TVA.

[2] Le dernier en date est le rapport de Pierre Richard, publié en décembre 2006, et qui propose de globaliser l’ensemble des concours financiers de l’Etat sous une seule enveloppe dont l’évolution serait unique et liée à une « négociation globale ».

[3] Il est d’ailleurs intéressant de noter que c’est toujours cette même définition du FCTVA qui figure sur le site du Minefi. La loi de Finances pour 2008 va mettre à contribution les finances locales. D’ores et déjà, il semble que le gouvernement veuille remettre en question l’indexation partielle sur la croissance de l’ « enveloppe normée », faisant ainsi perdre plusieurs centaines de millions d’euros de ressources au service public local. Conscient que cette évolution risque d’assécher très rapidement le développement – par ailleurs revendiqué – de la péréquation, le pouvoir central cherche activement à remettre en cause, dès cette année ou l’année prochaine, d’autres mécanismes organisant les liens financiers entre l’Etat et les collectivités locales et qui trouvent souvent leur origine, faut-il le rappeler, dans la propension du pouvoir central à supprimer ou alléger des taxes et impôts locaux et à les remplacer par des dotations ou compensations[3]. Parmi ces mécanismes figure le FCTVA, dont le montant pour 2007 est de 4,7 milliards d’euros. Retour rapide sur l’histoire d’un être budgétaire à part !

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