Le risque immense de priver les pouvoirs locaux de capacité d’intervention …

En tant que président délégué de la section française, j’ai participé, les 30 novembre et 1er décembre derniers, à la réunion semestrielle du comité directeur du Conseil des communes et régions d’Europe, à Berlin.

Parmi les sujets abordés, il y a eu bien entendu l’impact de la crise économique, sociale et financière sur les pouvoirs locaux et le rôle que ceux-ci peuvent jouer pour résoudre cette crise ou, à tout le moins en atténuer les effets sur les populations.

L’appréciation a été assez générale et consensuelle parmi les délégués qui représentaient les pouvoirs locaux d’une trentaine de pays. Face à la dureté de la crise mondiale, les institutions nationales ou internationales ont parfois des difficultés à réagir. Pourtant, au nom de l’ « efficacité », elles tentent de « mettre au pas » les autorités locales : celles-ci sont priées de partager l’effort commun et d’aller dans le sens voulu par le pouvoir central, à savoir la réduction drastique des dépenses publiques. C’est vrai – et comment ! – en France, mais c’est vrai aussi dans la plupart des autres pays.

Pourtant, toutes les enquêtes sur le terrain indiquent que la « bonne gouvernance locale » est absolument cruciale pour atténuer l’impact local d’une crise globale. Autrement dit, les réseaux sociaux créés et maintenus par les pouvoirs locaux, et le climat de confiance qu’ils entretiennent entre citoyens et gouvernants, permettent – et cela est notamment le cas en France – de préserver le bien-être des citoyens et leur capacité d’optimisme, dont la société a besoin pour, précisément, rebondir et trouver les voies d’un nouveau développement.

Nous sommes ainsi devant une forme de paradoxe. Alors que, partout en Europe et dans le monde, les citoyens sont convaincus que les réponses concrètes à la crise (qu’elle soit économique ou écologique, voire les deux à la fois …) viendront plus du niveau local que national ou international, les pouvoirs locaux sont placés dans une situation de dépendance de plus en plus étroite des pouvoirs centraux. Le cas de la France, à cet égard, est particulièrement édifiant : alors même que la souplesse d’intervention et l’engagement des collectivités locales est requise en permanence, voici que celles-ci se voient privées d’une partie de leur pouvoir fiscal par la suppression de la taxe professionnelle, en même temps que s’exprime une volonté rigide et technocratique de les contraindre à réduire leurs dépenses !

Les dirigeants nationaux, et notamment les nôtres, devraient y réfléchir avec un peu plus de profondeur qu’aujourd’hui au lieu de tout baser sur la communication et le court terme. Si demain les collectivités locales, dans tous nos pays, échouent dans leurs missions de maintien du lien social parce qu’elles manqueraient de ressources et de capacité d’adaptation, et si les experts, dans le même temps, annoncent la fin de la crise en se basant sur des indicateurs globaux peu ressentis par les citoyens, il faut s’attendre à de graves difficultés de compréhension entre les pouvoirs nationaux et des citoyens de plus en plus sensibles à l’injustice du fardeau mal partagé d’abord, et des dividendes de la reprise concentrés sur seulement quelques-uns ensuite.

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