Le combat juste de l’AMF

Il faut saluer l’initiative des l’Association des maires de France de lancer – enfin, pourrait-on dire – le mouvement d’une motion à faire voter par les conseils municipaux à propos du caractère « insoutenable » de la baisse des dotations d’Etat de 11 milliards d’euros sur trois ans.

En trois ans, les collectivités se verront privées de l’équivalent de 34 milliards d’euros par rapport à une évolution tendancielle. Cela représente une année d’autofinancement. C’est un montant énorme, qui va déstabiliser l’équilibre financier de la seule composante encore viable des acteurs publics français, provoquant une chute des investissements et une diminution sensible du niveau de service public rendu quotidiennement aux citoyens. Tout se passe, en définitive, comme si l’Etat, incapable de trouver en lui-même ou dans les organismes de sécurité sociale les sources d’économies nécessaires (par exemple, mieux lutter contre toutes les fraudes et tous les abus pourtant connus, abandonner les actions et contrôles de l’Etat dans les compétences transférées, etc.), sacrifiait les acteurs publics locaux et cherchait à leur transférer, en les étouffant, une partie de sa dette, tout en menant des campagnes de dénigrement systématique de la gestion publique locale.

C’est là un comportement proprement mortifère pour le pays. Ce sont aujourd’hui les collectivités locales qui assurent en grande partie le bon fonctionnement du pays au quotidien, qui mettent en œuvre les politiques publiques de proximité, qui gèrent le lien social, qui assurent la cohésion citoyenne minimale indispensable sans laquelle le pays risque de sombrer dans une forme d’anarchie. Les affaiblir de la sorte, c’est prendre un risque énorme. Seule l’ignorance avérée de la réalité de terrain ou le mépris de la haute administration relayé par quelques ministres ayant oublié qu’ils ont été aussi élus locaux peuvent expliquer une telle erreur stratégique.

S’y ajoute une faute morale, une forme de déni. Les transferts de l’Etat vers les collectivités locales ne sont nullement un cadeau, mais la contrepartie d’anciens impôts locaux ou de transferts de charges effectués depuis trente ans, que l’Etat s’est engagé solennellement à compenser. Diminuer ces transferts, c’est ipso facto revenir sur cet engagement. L’Etat se conduit mal et ne donne pas l’exemple. Les citoyens en paieront le prix au quotidien, sous forme de diminution des services publics et de mauvais entretien des infrastructures. Nous le regretterons amèrement dans dix ou vingt ans.

Ne nous trompons pas de combat. Lorsque certains estiment que l’enjeu majeur pour les collectivités territoriales est la « péréquation » – dont on n’a jamais su définir précisément les outils de mesure -, ils se trompent. La péréquation, c’est maintenant le partage d’un gâteau qui diminue violemment. Nous devons êtes solidaires pour exiger du système que les moyens des communes et communautés soient maintenus. Les associations d’élus n’ont pas vocation à co-gérer la pénurie avec l’Etat. Leur rôle est de dénoncer les pratiques de la haute administration, qui consiste à transférer la dette de l’Etat sur les communes, de prendre à témoins les Français, qui sont aussi demandeurs et utilisateurs des services publics, de l’inéluctable effondrement des investissements publics, facteur de chômage et de non-attractivité, et de la baisse de niveau des services de proximité. Voilà ce que nous attendons de nos associations d’élus. Voilà ce que fait l’Association des maires de France. Il faut relayer, partout, dans toutes non communes, son combat. Parce qu’il est juste et conforme à l’intérêt général. Et, pour le renforcer encore, signez le Manifeste des maires !

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