J’ai signé la tribune : la maîtrise du son, un enjeu prioritaire pour nos sociétés
Publiée dans Les échos 16 avril 2021
Il devient vital d’accorder de l’importance à notre environnement sonore urbain, estiment les auteurs de cette tribune collective. L’OMS estime que, d’ici à 2050, une personne sur quatre rencontrera des problèmes d’audition.
La découverte du silence, des sons oubliés, est l’une des rares conséquences heureusesdu confinement. Les urbanistes et architectes commencent à prendre conscience que ledésintérêt pour le sonore a contribué à transformer les sons en bruits que notre oreille
n’est pas capable de filtrer, à en faire une gêne, une nuisance. Il devient vital d’accorder del’importance à notre environnement sonore urbain, mais aussi à l’écosystème et auxautres organismes vivants. Le son structure notre manière d’habiter le monde bien au-delà des échelles nationales, mais écoute-t-on de la même manière à l’autre bout de laplanète ?
La maîtrise technologique du sonore s’universalise, pour le meilleur comme pour le pire.La compression du son, technique utilisée pour rendre les musiques et les messagesaudibles même dans un environnement bruyant, s’est généralisée avec le format standarddu MP3, dépouillant le son de ses nuances et des microsilences qui en constituent letimbre, la richesse. Cette perte de données a un impact négatif sur notre perceptionauditive et notre qualité d’écoute.
L’aspiration au silence, nouveau défi urbain
Ainsi, l’oubli des problématiques sonores a un impact majeur sur la santé auditive : oncompte plus de 460 millions de sourds et malentendants dans le monde, et l’Organisationmondiale de la santé estime que, d’ici à 2050, une personne sur quatre rencontrera desproblèmes d’audition. Une tendance qui crée un terrain favorable à l’isolement, auxmaladies cognitives et au mal-être.
Prise de conscience
Le sonore constitue également un formidable espoir technologique et social. Lesinnovations dans le domaine du son représentent des brevets et des perspectives decroissance. L’intelligence artificielle et la reconnaissance vocale offrent de nouvellespossibilités de confort. La création artistique bénéficie des derniers équipementsd’enregistrement et de diffusion.
Une prise de conscience de l’importance du sonore dans toute sa diversité est urgente etindispensable. Depuis 2017 via la résolution 39 C/49, l’importance du son dans le mondeactuel est reconnue par l’Unesco comme une composante essentielle de notre équilibre.
Retrouver le son dans la plénitude de ses usages et de ses possibilités, nécessite un actefort.
Nous proposons que la France porte une telle initiative, fédératrice et source de progrès etde rayonnement à travers les pays, en présentant sa candidature auprès du Bureauinternational des expositions pour l’organisation d’une exposition internationale du sonen 2027. Elle permettrait de mettre le son au premier plan comme facteur d’innovation etde partage.
Cette tribune collective, portée par Pascal Lamy (président du Forum de Paris sur la paix), Natalie Dessay (cantatrice), Christian Hugonnet (président de la semaine du son del’Unesco) et Christine Petit (directrice de l’Institut de l’audition), est cosignée par :
Bernard Boucault, préfet de région honoraire ; Françoise Benhamou, coprésidente duCercle des économistes ; Sandrine Bonnaire, actrice ; Etienne Caniard, ancien membre ducollège de la Haute Autorité de santé ; Jean-Claude Casadesus, chef d’orchestre ; MichelCymes, ORL ; Lionel Collet, conseiller d’Etat, praticien hospitalier ; Costa-Gavras, cinéaste ;Nicolas Curien, ancien numéro membre du CSA ; Jérôme Doncieux, fondateur de ETXStudio ; Laurence Equilbey, cheffe d’orchestre ; Mathias Fink, professeur à l’ESPCI Paris ;Cynthia Fleury, philosophe psychanalyste ; Bernard Fraysse, président de la sociétémondiale d’ORL ; Jean-Michel Jarre, auteur-compositeur-interprète ; Jean-Michel Klein,président de la Société française d’ORL ; Janine Langlois-Glandier, présidente du ForumMédias Mobiles ; Alain Londero, ORL ; Philippe Laurent, maire de Sceaux, secrétairegénéral de l’Association des maires de France ; Ibrahim Maalouf, trompettiste etcompositeur ; Frank Madlener, directeur de l’Ircam ; Marc Minkowski, chef d’orchestre ;Catherine Morin-Desailly, sénatrice, présidente de l’Association française des orchestres ;Pablo Katz, président de l’Académie d’architecture ; Nawal Ouzren, directrice générale dulaboratoire Sensorion ; Michel de Rosen, président de groupe Faurecia ; Jean-Noël Tronc,président de la Sacem ; Fabrice Vigneron, directeur général de Starkey France et Laurentde Wilde, jazzman et écrivain.