A la veille du congrès des maires 2010 …

Entretien paru dans Les Echos du 23 novembre 2010

La réforme de la fiscalité locale affecte les régions et les départements, mais pas les communes. Leurs élus doivent-ils s’en réjouir?

Pas vraiment. La réduction de la marge de manœuvre fiscale des départements et des régions pèsera sur nos moyens. Je redoute une baisse des capacités de subventions aux communes des régions et des départements avec un recul de l’effet péréquateur de leurs cofinancements sur leur territoire. On ne peut donc pas se désintéresser du sort qui leur a été fait. Par exemple, le département des Hauts-de-Seine mène une réflexion approfondie sur ses compétences facultatives, dans le domaine de la petite enfance notamment. Pour ma commune, l’arrêt de ses aides, représenterait trois points d’impôt ! L’affaiblissement fiscal des régions et des départements est une erreur pour l’équipement public et le développement des territoires. Et puis, si le bloc communal garde une autonomie assez importante, elle est totalement concentrée sur le foncier. C’est un point à surveiller dans la perspective de la réforme de la fiscalité du patrimoine.

 

La suppression de la taxe professionnelle sera t-elle bien neutre pour les finances communales ?

Nous avons eu du mal à faire prendre conscience au ministère des Finances, qui se plaçait surtout du point de vue du contribuable, du problème posé par les abattements sur la taxe d’habitation. Un dispositif correcteur un peu « bricolé », qui fait que personne n’y perd, a été imaginé. Plus globalement, un équilibre a été trouvé, mais à l’instant T. En termes de dynamique de ressources, certains territoires seront perdants à l’avenir et d’autres gagnants.
Que pensez-vous du gel des dotations de l’Etat l’an prochain ?

Il est dicté par la conjoncture, à la différence de la perte d’autonomie fiscale des régions et des départements qui résulte de choix politiques. L’AMF n’a pas contesté ce gel. Et puis Gilles Carrez, le rapporteur du Budget à l’Assemblée nationale a fait un travail remarquable en obtenant du gouvernement qu’il revoit la base de ses dotations. Cela a fait rentrer 149 millions d’euros de plus. Quand la conjoncture sera plus favorable, les dotations devraient à se remettre à progresser. C’est en tout cas ce qu’on peut imaginer, même si rien n’est jamais garanti du côté de l’Etat qui gagnerait à mettre un peu plus les formes avec les collectivités locales. Au lieu de les accuser de dépenser trop, il devrait plutôt les remercier de s’être associées à l’effort demandé !

La péréquation pour développer la solidarité financière entre communes est actée. Etes-vous satisfait du cap fixé dans le projet de loi de finances pour 2011 ?

L’idée de péréquation horizontale est intéressante. La faire jouer sur 2% des recettes fiscales du bloc communal, de façon progressive sur 3 ou 4 ans, est à la hauteur d’enjeux qui vont bien au-delà de la redistribution d’argent au 30 ou 40 communes en grande difficulté. Mais pour fonctionner, le système devra satisfaire plusieurs conditions. Il ne devra pas être trop complexe et il lui faudra pouvoir s’adapter aux spécificités des territoires. La péréquation n’a pas le même sens en Ile-de-France qu’en Auvergne. La fixation d’une partie des critères de péréquation doit être décidée localement. L’idée que nous avons développée à l’AMF d’un double système national et régional a été adoptée par l’Assemblée nationale. Enfin, l’assiette des ressources à prendre en compte doit être la plus large possible. Au plan fiscal, il faut aussi mettre dans la balance toutes les taxes indirectes. On doit également intégrer les produits du domaine et les dotations d’Etat qui donnent encore lieu à des écarts très importants par habitant. Tout cela sera discuté l’an prochain.

Les dispositions qui renforcent de l’intercommunalité dans la réforme des collectivités locales conviennent-elles ?

A certains égards, cette réforme créera plus de problèmes qu’elle n’en résoudra. L’obligation d’achever la carte de l’intercommunalité va créer des tensions très fortes au sein des communautés. Certaines vont devoir intégrer des communes dont personne ne veut. Il aurait mieux valu trouver un moyen d’imposer aux communautés récalcitrantes de verser de l’agent aux communes pauvres pour les inciter à évoluer vers plus d’ouverture.

Propos recueillis par Joël Cossardeaux, Les Echos

Laisser un commentaire