Pendant la campagne, la crise continue
Régulièrement, la France s’offre quelques semaines en « suspension ». Elle attend la désignation de celle ou celui qui sera de fait, pendant cinq ans, une sorte de monarque républicain absolu, femme ou homme providentiel. La réalité semble ainsi prendre quelques vacances. Mais elle sera au rendez-vous du 7 mai. Car, pendant la campagne, la crise continue. Et, après l’élection, tout ce qui fait la vie, l’espoir ou le désespoir de nos concitoyens sera encore comme avant.
Cette crise, c’est d’abord une crise de confiance. Elle ne date pas d’hier. Notre pays a cette détestable habitude de chercher – et de finir par trouver -, en son sein même, les boucs émissaires de ses difficultés, pour mieux s’exonérer des efforts de réforme. Le résultat en est la priorité à la norme et au contrôle, qui freine l’enthousiasme et la mobilisation des énergies. On ne trouve rien de tel dans les pays qui connaissent un vrai équilibre des pouvoirs, entre le national et le local, et dans lesquels une élection nationale est un événement parmi d’autres parce que précisément, les citoyens savent que tout ne dépend pas d’elle. Et qu’eux-mêmes et leurs dirigeants se comportent en conséquence.
Au lendemain de la « fête républicaine », les élus locaux dans leur immense majorité attendront du président élu une démarche de rassemblement autour de l’intérêt général. L’urgence est de rétablir la confiance entre l’Etat et les territoires, de créer une nouvelle « ambiance ». Il faut dresser un constat lucide et partagé de la situation – comme par exemple sur les vraies difficultés à venir du recours à l’emprunt, occultées par des discours lénifiants -, identifier les atouts actuels des collectivités locales françaises, faire cesser les faux procès comme celui, totalement inapproprié, sur les effectifs, taire définitivement les discours accusatoires et diviseurs, considérer les élus locaux comme des partenaires capables de négocier et pas seulement comme les exécutants de politiques décidées ailleurs, quand bien même on aurait vaguement « concerté ».
Il faudra ensuite poser le cadre de relations dépassionnées et plus « professionnelles » : à cet égard, tout a déjà été dit, rien – ou presque – n’a été fait. L’idée de la Conférence nationale des exécutifs doit être reprise, sur de meilleures bases. Les élus locaux eux-mêmes devront faire leur part du chemin en se dotant, enfin, d’une organisation fédérative et d’outils d’expertise communs et indépendants. Pour qu’enfin l’immense énergie des territoires redonne à tous l’espoir.
En pièce jointe, le texte d’une interview à lagazette.fr publiée le 10 avril 2012.