Finances locales : un rapport explosif qui met fin aux libertés locales !
Entretien paru dans le Parisien du 22 mars 2014, à propos d’un rapport non encore publié portant sur la limitation strcite des dépenses des collectivités et rédigé par Martin Malvy et Alain Lambert, tous deux anciens ministres du Budget et élus locaux.
Le rapport propose de limiter d’une façon quasi contraignante les dépenses locales…
PHILIPPE LAURENT. Les représentants des collectivités sont élus au suffrage universel. Ils sont libres de mener des politiques publiques ambitieuses, tant qu’ils trouvent à les financer. Brider la dépense publique des collectivités, c’est remettre en cause la légitimité politique des élus locaux. Il faudrait en outre réviser la Constitution. Qui plus est, on se trompe de diagnostic ! On n’est pas face à un problème de dépense mais de financement.
Qu’entendez-vous par « problème de financement » ?
Les dotations versées par l’Etat baissent et on ne peut plus augmenter la fiscalité locale. Or, les collectivités ont surtout besoin de ressources plus pérennes et plus justes. Les départements, eux, financent de lourdes dépenses sociales. Il serait logique qu’une partie de la contribution sociale généralisée leur revienne. Mais ça, l’Etat n’a jamais voulu en entendre parler.
Il n’y aurait donc aucun problème du côté des dépenses des collectivités locales ?
Effectivement. Nous finançons des infrastructures, l’éducation, la culture, le patrimoine, la formation… Ce sont des dépenses d’avenir et des dépenses normées. Lorsque l’on ouvre une crèche, nous sommes obligés de recruter un nombre précis d’employés. Baisser les dépenses, c’est, inéluctablement, supprimer des services publics. Ouvrir ce débat ne me pose pas de problème de fond. Mais il faut le présenter clairement et non en prenant des mesures techniques sur les dépenses. Je dis donc « chiche », mais allons jusqu’au bout de la réflexion.
Le rapport propose un pacte entre l’Etat et les collectivités locales sur des engagements de dépenses et de recettes…
Je suis au contraire pour aller beaucoup plus loin dans la décentralisation. Il faut ôter de nombreuses contraintes, faire en sorte que les élus locaux puissent prendre des initiatives y compris avec des entreprises. C’est comme ça que l’on pourra s’en sortir, non en prenant des normes contraignantes et en fermant les robinets.