Entretien avec la Gazette des communes

Entretien de Philippe Laurent sur la péréquation horizontale et le financement des collectivités, dans le cadre du Comité directeur du Conseil des communes et Régions d’Europe.

Qu’avez-vous dit aux représentants des associations d’élus européennes réunies mardi 13 décembre à Bruxelles dans le cadre du CCRE ?

Nous avons évoqué les conséquences de la crise sur l’autonomie locale, les finances locales, les conditions d’exercice des responsabilités et compétences des collectivités locales dans les différents pays d’Europe. La préparation de directives a également fait l’objet de débats, comme sur les services d’intérêt général ou les concessions de services.

La France a notamment insisté sur la question essentielle du maintien nécessaire de la capacité d’investissement public local, pour créer de la croissance, préserver l’emploi et préparer l’avenir des territoires. Cela implique d’au moins stabiliser les ressources publiques locales – et notamment les transferts en provenance des Etats centraux -, et de veiller à ce que l’emprunt reste accessible, ce qui n’est plus le cas actuellement dans plusieurs pays.

La mise sous surveillance des pays de tous les pays AAA de la zone euro, dernier épisode du long feuilleton d’une crise qui semble interminable, vous fait-elle craindre de réelles difficultés de financement pour les collectivités l’an prochain ?

En tant que telle, la mise sous surveillance des Etats souverains n’a pas de grandes conséquences directes sur le financement des collectivités locales. En revanche, les conséquences de la crise sont et seront redoutables. D’abord, les Etats centraux, confrontés à un endettement massif, tenteront de réduire leurs transferts. Ensuite, l’aggravation de la crise économique et la forte inquiétude des décideurs face à l’avenir provoqueront l’apparition d’importants risques sociaux que les collectivités locales devront amortir. Enfin, le retrait forcé d’un acteur majeur comme Dexia ajouté au retrait des banques du marché du financement public local pour cause d’application de ratios prudentiels renforcés (dits Bâle 3) crée une situation très préoccupante. Dans l’état actuel des choses, il manque au moins 10 milliards d’euros de prêts pour 2012. On ne peut être qu’abasourdis devant la légèreté et l’inconséquence des négociateurs français à Bâle qui ont totalement ignoré les spécificités du secteur public local, amenant ainsi recul de l’investissement local et chômage.

Pensez vous que les députés vont entériner la création du Fpic ?

Oui. Le texte qui sortira aura été nettement amélioré après le passage au Sénat, même si celui-ci fut quelque peu chaotique. Le bureau de l’Association des maires de France a d’ailleurs donné son aval, le 8 décembre, à une formule resserrée du fonds, avec notamment le gommage des effets de seuils liés aux fameuses « strates » – ce que nous avons toujours demandé mais que l’administration se refusait à mettre en place au motif d’une trop grande complexité – et prise en compte de l’effort fiscal pour les reversements. Tout ceci va dans le sens des propositions des associations d’élus locaux formulées au printemps. Certes, ce texte ne sera pas parfait et il subsistera certains effets pervers. C’est pourquoi il faudra évaluer soigneusement son application afin de proposer les correctifs nécessaires l’année prochaine. Mais il était important que le fonds soit mis en place dès cette année 2012, même sur une enveloppe réduite : il s’agit là d’un acte politique fort voulu par les collectivités elles-mêmes, qui montrent ainsi leur sens des responsabilités et leur solidarité territoriale.

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