« Reconquérir nos centres-villes, c’est reconstruire la France »

Le Journal du Grand Paris, le 1er novembre 2025

« Nos centres-villes sont à la fois le cœur battant et le visage de la France. Ils racontent notre histoire, portent notre identité, concentrent nos services, nos commerces, notre vie sociale et culturelle. Mais depuis déjà trop nombreuses années, ils s’essoufflent », déplore Philippe Laurent, maire (UDI) de Sceaux, président de Centre-ville en mouvement et de l’Association française du Conseil des communes et régions d’Europe. Une tribune publiée en amont des Assises européennes et métropolitaines du centre-ville qui se tiennent le 6 novembre, à l’initiative de Centre-ville en mouvement et de la Métropole du Grand Paris.

La désertification commerciale, la spéculation immobilière, la vacance des logements, la standardisation urbaine fragilisent ce qui faisait notre singularité et notre lien collectif.

Ce n’est pas seulement une question d’urbanisme ou d’économie : c’est une question de société. Car lorsque les centres-villes se vident, c’est le pays tout entier qui se fracture — entre ceux qui vivent dans des territoires dynamiques et ceux qui se sentent relégués, entre les métropoles saturées et les villes moyennes qui peinent à attirer. La vitalité des centres-villes est une condition de la cohésion nationale.

Réhabiliter et reconquérir nos centres-villes, ce n’est pas céder à la nostalgie. C’est préparer l’avenir. C’est faire le choix d’un modèle d’aménagement durable, économe en ressources, respectueux de l’environnement et des personnes. C’est aussi répondre à l’aspiration des Français à une vie plus locale, plus humaine, plus équilibrée.

Dans les centres-villes se joue la transition écologique : moins de voitures, plus de transports partagés, de mobilités douces et d’espaces publics apaisés. C’est là que s’expérimentent les circuits courts, l’économie circulaire, la rénovation énergétique du bâti ancien. C’est aussi là que se recrée le lien social, par la proximité des commerces, des écoles, des services publics et des lieux de culture.

« Partout en Europe, les villes affrontent les mêmes défis »

Dans ce débat, l’Europe est un partenaire, car cette ambition dépasse nos frontières. Partout en Europe, les villes affrontent les mêmes défis. L’Union européenne a commencé à soutenir des programmes urbains intégrés — mais elle doit aller plus loin. Les politiques de revitalisation doivent être pleinement reconnues comme des politiques européennes à part entière, au même titre que la transition énergétique. Elles participent pleinement à la politique de cohésion. Les fonds européens, les programmes de recherche et les échanges de bonnes pratiques doivent être mobilisés pour donner à nos cités les moyens d’innover, de coopérer et de réussir ensemble.

Face à ces défis, les maires et les élus locaux sont les premiers acteurs de la transformation.
Chaque jour, ils inventent des solutions concrètes pour revitaliser leur cœur de ville, redonner vie aux commerces, reconvertir des friches, associer les habitants. Mais ils ne peuvent pas tout faire seuls. Ils ont besoin d’un État partenaire, comme il a su l’être ces dernières années, avec les programmes « Action cœur de ville » et « Petites villes de demain ». Ils ont besoin de règles adaptées, à leur main, concernant notamment la lutte contre la vacance commerciale et les loyers commerciaux trop élevés. Ils ont besoin d’un urbanisme plus souple, permettant de préserver la diversité commerciale et artisanale. Ils ont besoin d’outils financiers pérennes et de foncières locales puissantes et agiles. Des réussites récentes dans certaines villes ont montré qu’il était possible d’agir vite et bien, à condition d’écouter les élus, de leur faire confiance et de leur donner les moyens nécessaires, tant juridiques que financiers.

Reconquérir nos centres-villes, c’est réaffirmer une certaine idée de la République : celle qui garantit à chaque citoyen, où qu’il vive, un cadre de vie digne, animé et accessible. C’est aussi redonner du sens à la décentralisation, en confiant aux territoires les leviers du développement.

Le 6 novembre prochain, les Assises européennes et métropolitaines du centre-ville réuniront, à l’initiative de Centre-ville en mouvement et de la Métropole du Grand Paris, plus de mille élus, acteurs économiques, urbanistes et chercheurs autour d’un message commun et européen : nos centres-villes ne sont pas condamnés, ils sont notre avenir. Il est temps de leur rendre la place qu’ils méritent dans le débat public et dans les priorités de l’action publique. Une France des proximités, des initiatives et des liens humains. C’est ce projet que nous porterons avec force lors des Assises du centre-ville et au-delà.

Philippe Laurent
Maire de Sceaux
Président de Centre-ville en mouvement
Président de l’Association française du Conseil des communes et régions d’Europe